La télé française a un problème : elle n’arriverait pas à se « déblanchir ». Le mot n’existe pas, mais on parie que les Académiciens, sous la pression des médias bien-pensants, vont nous le valider un de ces quatre. Comme la télé reste indécrottablement blanche, deux propositions ont été soumises à l’Assemblée nationale – ça remonte jusque-là, le problème de blancheur dis donc – pour inciter beaucoup plus furieusement les patrons de chaîne à embaucher du coloré.
Des patrons qui se tapent comme de leur premier rail de coke de ces initiatives venues d’en haut et qui sentent bon le cassage d’audience. Non pas que les Français n’aiment pas les animateurs de couleur, du moment qu’il y a du talent, mais ils n’aiment pas qu’on leur impose des choix oligarchiques. Car la popularité de l’animateur télé, c’est une « décision » du peuple, par définition. Les politiques n’ont rien à voir là-dedans, eux qui ne sont populaires que de manière forcée, par le matraquage de leurs passages télé-radio. Baroin ou Cambadélis n’existent dans l’imaginaire collectif que parce que les chaînes nous tartinent du matin au soir leurs phrases creuses à triple sens, dont le peuple se fout royalement. C’est ça, la démocratie.
Mais ne nous écartons pas du sujet, et ne tombons pas dans l’antiparlementarisme primaire, le populisme et toute la gamme des honneurs politiques.
Et donc le CSA, qui devait veiller à ce que les « minorités visibles » soient plus et mieux représentées, sans toutefois disposer d’un pouvoir de coercition, en appelle à la bonne volonté des chaînes. Qui ne sont pas racistes mais qui respectent tout bêtement les proportions des différentes communautés qui composent la France : d’abord une masse de Blancs, puis des minorités de colorés. On ne fait pas de statistiques ethniques, ce qui est presque puni de mort chez nous, on rappelle juste quelques évidences : la France est un pays de socle chrétien et d’inspiration hellénique. Ou l’inverse, on sait plus trop. Mais en gros, c’est ça. On n’est pas encore un peuple africain animiste ou musulman, et on dit ça sans acrimonie ni arrière-pensée. C’est un fait.
Donc si TF1 se met à remplacer Jean-Pierre Pernaut à 13 heures par un Français d’origine israé, pardon, algérienne, ça va moins le faire dans les chaumières et les provinces, la cible de ce JT. C’est mécanique, pas besoin de hurler au racisme. C’est comme si Hollande prenait un Premier ministre de, d’extrême droite. Merde, mauvais contre-exemple.
Ça n’a pas empêché le CSA de calculer le temps d’antenne des « personnes perçues comme non-blanches ». Des PPCNB, l’acronyme est de nous, pas l’expression technocratique ! On en serait, tenez-vous bien, à 14% ! Mais la stat qui tue, rapportée par Libé (on cite nos sources, nous), ce sont les 37% de temps d’antenne dévolus aux PPCNB quand il s’agit d’individus ayant des « activités marginales ou illégales » ! Gloups ! Ce qui désole la préposée au problème racial au CSA, la gentille Mémona Hintermann, et fait probablement jouir le méchant Éric Zemmour !
Puisqu’on est dans la blancheur, autant y aller à fond. La nouvelle star nationale, et européenne, en foot, c’est Antoine Griezmann. On vous la fait courte, parce qu’on a perdu pas mal de temps sur cet inutile et coûteux CSA.
Griezmann, son histoire, c’est curieusement Bruno Roger-Petit (BRP) qui en parle le mieux : politiquement déviant, BRP est footballistiquement très affûté. Il explique qu’Antoine était jugé par les sélectionneurs de jeunes trop chétif pour intégrer l’équipe de France. Du coup, il s’est expatrié en Espagne, où on n’a pas ce problème de gabarit : les génies Xavi et Iniesta sont des crevettes, et sont champions du monde. Ils sont tellement forts qu’ils faisaient (Xavi a arrêté) courir les autres, ces grands gaillards plus forts physiquement que doués balle au pied. Eh bien nos détecteurs de talents ont zappé toute une génération de techniciens pour privilégier les armoires à glace, on se souvient du scandale lancé par Mediapart, qui voulait voir du racisme dans l’équipe de France, alors que c’était exactement l’inverse : une surreprésentation des colosses de couleur, censés avoir plus de résistance que les « petits Blancs ».
Tout ça pour dire que BRP – ça nous arrache la gueule mais c’est la vérité – a eu raison d’écrire que Griezmann ferait oublier Benzema. Griezmann, c’est l’anti-Benzema.
L'@equipedefrance solidaire de nos policiers@AntoGriezmann remet le ballon du match #FRAIRL au fils de JB Salvainghttps://t.co/CWWXjOUDXG
— Police Nationale (@PoliceNationale) 29 juin 2016
Et il vient de frapper un grand coup, peut-être un peu grand pour lui, ou soufflé par quelque agent qui veut faire encore grandir sa cote : il a offert le ballon du match France/Irlande à l’orphelin du couple de policiers assassinés… Et là, les symboles s’entrechoquent : le petit Blanc, catholique, gentil, souriant, propre sur lui, qui chante la Marseillaise, contre le méchant Français d’origine algérienne, qui n’aime pas la France, crache pendant l’hymne national, exhibe ses bolides et ses poufs, le contexte terroriste, tout ça… Le Bien, le Mal... Oui, ça sent le think tank à gros sabots à crampons de la Fédération, le redorage de blason, le blanchiment d’image des Bleus. Enfin, c’est toujours mieux que Knysna (2010) et la fronde du Racaille football club dénoncé par le journaliste Daniel Riolo.
Un retour à la vertu, et peut-être à la victoire… Un exemple venu d’en bas (car malgré son fric le footeux reste un prolo) qui ferait bien d’inspirer ceux d’en haut.
Puisqu’on est dans le racisme, réel ou supposé (en France on ne sait même plus ce que ça veut dire, tellement on l’a plongé dans toutes les sauces), la chaîne BeIN Sports s’est permis de faire des blagues lourdingues sur les Portugais. Qui jouent le premier quart-de-finale de l’Euro 2016 ce soir contre la Pologne, qui a aussi eu droit à sa blague.
On est loin du niveau des Guignols des années 1990.
À propos, il faudrait que la chaîne qatarie évite que ses clients qui ont payé pour voir l’Euro 2016 sur le Net se fassent piller leur abonnement par des employés indélicats, qui refilent les codes de connexion à leurs petits copains... Quand on met son identifiant et son mot de passe et qu’on découvre qu’ils sont déjà utilisés, et qu’on passe pour le voleur, ça la fout mal. La Coupe du Monde 2022 au Qatar, ça promet.